Marie-Madeleine rencontre Jésus ressuscité

Evangile de St Jean 20,11-18 (Mardi de Pâques)
Giotto. Noli me tangere (v.1320).
Fresque, Basilique Saint-François d’Assise, église inférieure. (p91/124).

Introduction

Madeleine, Marie-Madeleine, Marie de Magdala : tels sont les noms les plus courants pour désigner cette figure féminine du Nouveau Testament. D’après les Evangiles, elle fait partie d’un groupe de femmes qui suit Jésus depuis la Galilée jusqu’à la Crucifixion. Ces femmes jouent un rôle important auprès de Jésus et des Douze Apôtres. Elles assurent le service matériel du groupe dans la vie quotidienne (préparation des repas, du logement etc…). Marie-Madeleine et les autres femmes vivent dans l’intimité de Jésus. En le suivant dans ses déplacements depuis la Galilée jusqu’à Jérusalem, elles ont accès à son enseignement, elles sont témoins de ses faits et gestes et de son comportement. L’évangéliste Jean précise que quelques femmes, dont Marie-Madeleine, sont présentes au pied de la croix (Jean 19,25). Leur cheminement les fait passer du service (diakonia) à l’amour-amitié (philia) de Jésus : « Je ne vous appelle plus serviteurs…je vous appelle mes amis » (Jean 15,15). Dans ce contexte, Marie-Madeleine est la première personne à bénéficier de l’apparition de Jésus ressuscité. La scène décrite en Jean 20,11-18 a inspiré de nombreux peintres de l’Occident chrétien.

Giotto (1267-1337) est l’un des fondateurs de cet art occidental qui succède à l’art médiéval depuis le XIV° siècle jusqu’au XIX° siècle. Les personnages représentés deviennent des êtres humains qui éprouvent des émotions, des sentiments qui parlent aux croyants. Les fresques qui ornent les murs des églises sont une véritable catéchèse en images. Telle cette fresque peinte par Giotto, appelée « Marie–Madeleine rencontre Jésus ressuscité. Noli me tangere (ne me touche pas) ».

Description de la fresque.

Située au creux d’une arcature de la Basilique San Francesco inférieure à Assise, la fresque est construite selon une ligne oblique qui délimite deux zones : en haut le ciel, en bas une falaise rocheuse, la terre. Les personnages sont groupés par deux, dans des espaces bien différenciés : au premier plan à droite, Jésus et Marie-Madeleine ; à gauche, légèrement en arrière, deux anges assis sur le tombeau vide ; en haut, un grand espace vide bleu sombre, le ciel, où un couple d’anges surgit dans un vol qui les emporte vers la droite. Tous les personnages se dirigent vers la droite, vers un lieu qui n’est pas représenté.

Analyse de la fresque

– Les anges sont présents dans le ciel et sur la terre. Leur nom signifie leur fonction : ils sont des messagers de Dieu, assurant la communication entre le ciel et la terre. Par les anges, notre regard s’étend au-delà du visible. Ils disent la présence de Dieu agissant parmi les hommes.

Dans la fresque de Giotto, deux anges surgissent dans le ciel dans un halo de lumière contrastant avec le bleu sombre qui nous rappelle que la scène a lieu « de grand matin ; c’était encore les ténèbres » (Jean 20,1). Les ailes déployées, les mains tendues en avant, ils se dirigent vers la terre, sans doute pour accueillir Jésus car ils sont placés juste au-dessus de lui.

– Les deux autres anges sont au creux de la falaise, dans la zone terrestre. Ils sont assis sur le tombeau vide (Jean 20,12). Celui de droite est représenté de profil, les ailes déployées, prêt à prendre son envol car sa mission est terminée. Sa main droite tendue invite le spectateur à porter son attention sur ce qui se passe un peu plus loin, dans une anfractuosité du rocher, entre Jésus et Marie-Madeleine.

– Jésus et Marie-Madeleine occupent un espace clos, délimité par une ligne oblique qui enserre Marie-Madeleine. Agenouillée devant son Seigneur qu’elle a enfin trouvé, les bras tendus en avant, elle essaye de le retenir dans un élan de tout son corps. Son visage découvert permet de discerner son regard et son expression qui traduisent une supplication intense et une adoration muette.

Jésus se tient debout, attitude qui caractérise le Ressuscité, le Vivant. De sa main gauche il tient le bâton du berger : il est bien celui qui connaît ses brebis et les appelle chacune par son nom (Jean 10,1-30), son bâton les guide et les rassure (Ps 22,4). Mais certains attributs signifient qu’il est désormais dans la sphère divine : son vêtement blanc bordé d’un galon d’or, éblouissant de lumière, son nimbe cruciforme, une auréole de rayons dorés émane de tout son corps pour dire son corps glorieux. Il amorce un pas vers la droite pour signifier qu’il monte vers le Père (Jean 20,17) tout en regardant Marie-Madeleine ; son bras tendu en arrière prolongé par sa main traduisent la distance qui le sépare désormais de ses disciples. Le jeu des mains, qui se superposent, signifie le désir de Marie-Madeleine et le départ de Jésus vers un autre monde où elle ne peut pas le suivre : « Ne me retient pas ».

Conclusion

L’instant décrit par Giotto est ce moment pathétique où Marie-Madeleine voudrait saisir son Seigneur, mais Jésus lui donne une mission : « Va trouver mes frères » (Jean 20,17). Elle doit accepter de tourner le dos au tombeau vide pour aller dire aux disciples que Jésus est vivant et qu’il monte vers son Père, qui est aussi le Père des croyants, devenus les frères de Jésus. Désormais les croyants appartiennent à une seule famille (Romains 8,15. Marc 3,31-35).

C’est en diffusant la Bonne Nouvelle dans le monde que Marie-Madeleine et tous les futurs disciples seront avec leur Seigneur : «De toutes les nations faites des disciples : baptisez-les au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit, apprenez-leur à observer tout ce que je vous ai commandé. Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde. » (Matthieu 28,20).

Hélène Piéchon-Palloc.